CAN ya ma CAN…

CAN ya ma CAN…

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Lorsqu’il perdit la Coupe du Monde 1990 à la suite d’un penalty litigieux accordé à son adversaire, Diego Armando Maradona, qui avait porté une déplaisante sélection d’Argentine jusqu’à la finale, déclara « j’aurais préféré perdre 4-0 que comme ça… »  Nous n’avons pas Maradona -même si les médias nous vendent le lynx au même prix-  mais nous avons les mêmes interrogations aujourd’hui. Aurait-il mieux valu perdre durant le temps réglementaire ? Aurait-il mieux valu encaisser ce penalty à un quart d’heure du terme plutôt que de subir de nouveau un but contre notre propre camp ? Aurait-il été moins douloureux d’être battu dès la première période que de renverser la vapeur comme la sélection le fit après le repos ?

Varaboutisme

Pour Moëz Hassen, tristement passé du statut de héros en sauvant le tir des onze mètres à celui de mouton noir en encaissant ce but, il aurait sans doute mieux valu que le Sénégal nous élimine endéans 90 minutes. Il supporterait un moindre fardeau, et un gardien encore jeune et rempli de potentiel ne serait pas sacrifié à l’autel du populisme ambiant. Se rappelle-t-on du nombre de reproches faits à El Ouaer avant sa performance française en 1998 ? Se souvient-on du nombre de fois que Attouga fut mis en cause, dont notamment lors de la défaite en finale de la CAN 1965 ? Le jeune homme n’était alors pas majeur et on l’accabla. On sait la carrière qu’il fit ensuite et ce que la sélection lui doit. Un gardien, pour citer Albert Camus qui savait de quoi il parlait, est souvent un homme terriblement seul.

Cette défaite en finale de 1965, quoique perdue contre le Ghana, est d’ailleurs tout autant due au Sénégal qu’au Black Star. En effet, déçus de ne pas s’être qualifiés (Tunisie et Sénégal se quittèrent sur un 0-0, et seul le goal-average permit à la Tunisie de passer puisque les deux équipes avaient étrillé l’Ethiopie par quatre buts d’écart) les Lions boudèrent les cérémonies protocolaires et mirent match de classement et finale en retard. On alluma à cause de cela les projecteurs du stade Chedly Zouiten (installés en 1960 et rarement utilisés), et la légende veut que ce soient ceux-ci qui aient gênés le dernier rempart tunisien sur le but égalisateur ghanéen. Le Sénégal nous a donc déjà battu dans des circonstances houleuses -et nous en 2004 dans des conditions brumeuses. Mais sans doute devrions nous nous demander pourquoi.

Records en tout genre

Oui, pourquoi, hormis la décision récente du Tribunal du Sport concernant la finale de la coupe des clubs champions (et où le TAS a dû déjuger la CAF), les cas de litiges tranchés en faveur de la Tunisie ou des clubs tunisiens sont-ils rarissimes ? Pourquoi même dans de pays gangrénés par la corruption nous avons si mauvaise presse ? Pourquoi les agences de pronostics excluent désormais notre football de leurs tablettes ? Pourquoi chaque dirigeant, chaque sélectionneur, chaque entraîneur recommence tout à zéro à chaque révolution de palais ? Pourquoi depuis Mokhtar Ben Nacef aucun footballeur issu de notre championnat n’a inscrit son nom à un palmarès européen digne de ce nom ? Il y eut bien quelques saisons honnêtes réussies par des joueurs corrects qui souvent filèrent vers des cieux moins exigeants dès qu’ils le purent, mais où sont nos Mané, Salah, Abedi Pelé, Amokachi, Bwalya, Madjer, N’kono, Bell, Zaki, Milla, Keita, Bocandé, Hadji Diouf, Fofana, Gervinho, Weah, Essien ?.. Même nos arbitres, à une époque valeur exportatrice mais impropre pour le marché local, n’ont plus la côte. Mais rassurez-vous, les médias vous l’ont répété, la sélection vient d’égaler le record de participations consécutives à la CAN. Et M’sakni a établi un record en marquant dans quatre phases finales différentes. Il est étonnant qu’aucun média n’ait mis en avant le fait que nous étions la dernière équipe capable de battre l’Algérie lors d’une Coupe d’Afrique tiens, encore un merveilleux accomplissement à inscrire dans notre livre d’or…

Reste après tout cela l’amertume d’une décision tronquée (n’oublions pas que nous aurions tout aussi bien pu re-rater ce pénalty), celle de ne pas avoir vu la sélection jouer jusqu’au bout de ses possibilités, et un feuilleton post-ramadan terminant en queue de poisson. Mais réjouissez-vous, la saison sportive vient de reprendre, en toute logique avec la finale de la coupe de l’année dernière, et un somptueux 0-0. Ca symbolise assez bien l’excellence de notre savoir-faire.